Le Bloc-notes
de Jean-Claude Trutt

Islam vs. Femme (suite)

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On sait maintenant un peu mieux ce qui s’est passé la nuit de la Saint Sylvestre à Cologne. 561 plaintes de femmes ont été enregistrées (surtout vols avec violence, mais aussi beaucoup d’agressions sexuelles). Une trentaine de suspects. 19 arrestations de jeunes en grande majorité originaires d’Afrique du Nord.
Précisons d’abord un premier point : il n’est évidemment pas question pour moi de hurler avec les loups, de lier un tel incident au problème des réfugiés (d’ailleurs seuls 4 suspects sont Syriens) comme le fait la droite de la droite en Allemagne, ou aux immigrés en général ce que va certainement faire notre FN français.
Mais il y a un lien que j’ai fait spontanément, c’est le mode d’action que certaines victimes ont décrit, et qui m’a fait penser immédiatement à une des scènes du film égyptien les Femmes du Bus 678 que j’ai racontée dans une note de mon Bloc-notes 2012 et intitulée Islam vs Femme. Le film est l’histoire de trois femmes qui ont toutes été victimes d’agressions sexuelles dans leur vie de tous les jours au Caire et qui font alliance et se rebiffent.
« La deuxième, Seba, » ai-je écrit, « est mariée avec un médecin, fou de football. Pour lui faire plaisir elle l’accompagne à un grand match, Egypte-Algérie. L’Egypte gagne, la foule est en liesse, à la sortie du stade des hommes arrivent à séparer Seba de son mari, on fait cercle autour d’elle et tous s’en donnent à cœur joie, les attouchements partout (sans aller jusqu’à la violer, semble-t-il). Seba est d’autant plus effondrée que ce soir-là elle voulait annoncer à son mari qu’elle était enceinte. Mais c’est le mari qui est touché. C’est lui qui ne veut plus de sa femme. Elle est salie. Il ne peut la voir sans penser à ce qu’on lui a fait. Elle s’en va. Et quand beaucoup plus tard, il veut revenir à elle, c’est elle qui ne veut plus de lui. Jamais je ne pourrai te pardonner, lui dit-elle. J’avais besoin de toi à ce moment-là. J’étais enceinte, j’ai perdu mon bébé. Répudie-moi, je t’en prie. Et il la répudie. »
Isoler une femme, l’emprisonner dans un cercle d’hommes et, ensuite, s’en donner à cœur joie aux attouchements ou autres violences, c’est exactement le cours opératoire décrit par certaines des victimes à Cologne (ou à Vienne ou Stockholm).
Ici je voudrais préciser un deuxième point. Le mâle humain a toujours été un prédateur sexuel. Et dès qu’il peut se déchaîner, en particulier lors des guerres, il le fait : Russes à Berlin, Serbes en Bosnie, Africains au cours de toutes les guerres tribales, et Islamistes de Boko Haram et compagnie en Afrique. Et les viols collectifs en temps de paix existent aussi dans beaucoup de régions du monde. Il n’y a qu’à penser aux nombreux faits divers assez horribles qui nous ont été rapportés ces dernières années d’un pays comme l’Inde. Il ne s’agit donc pas de jeter l’opprobre sur des communautés entières, comme celles issues de pays à majorités musulmanes, sous prétexte que certains individus de ces communautés ont été les acteurs de ce genre de faits divers.
Non, mais ce qui me paraît essentiel, primordial, c’est qu’une relation évidente existe entre la façon dont une culture considère la femme et le risque que la femme court à devenir l’objet d’une agression sexuelle. C’est ce qui ressort très clairement de ma note de 2012. Et cela pourrait même expliquer la situation indienne. N’y a-t-il pas une ancienne tradition de l’infériorité de la femme ? Bouche inutile à la naissance (l’ethnologue et explorateur Richard Burton rapporte, alors qu’il travaillait pour le gouvernement colonial anglais du Raj, que l’on faisait écraser les bébés fillettes sous les pattes des éléphants), et complètement méprisée une fois veuve (encore heureux si elle ne devait pas mourir brûlée sur le bûcher funéraire de son mari).
Ce qui caractérise d’abord la position de la femme dans la culture musulmane c’est son infériorité par rapport à l’homme. C’était le cas dans toutes les cultures du monde, à cause de la supériorité physique de l’homme (et même chez nous en Europe son émancipation est encore toute récente), mais dans les pays musulmans elle perdure parce qu’elle s’appuie sur la religion (la religion a bon dos) et dans certains pays comme l’Arabie Saoudite elle prend des traits extrêmes et extravagants (la femme ne peut rien faire sans l’autorisation de son mari ou de son père et elle n’a même pas le droit de conduire !). La supériorité de l’homme y est telle qu’elle autorise ce qui serait considéré comme un crime abominable dans toutes les autres cultures, l’exécution de la femme ou de la fille appelée crime d’honneur. C’est ce que nous a montré le film syrien Passion que nous avons vu à l’occasion du festival du cinéma arabe de Fameck en 2012 et dont je parlais dans ma note. « Le synopsis était pourtant plutôt anodin », avais-je écrit. « Imane aime son mari, ses enfants et Oum Kalsoum… Seulement elle est une femme syrienne et aux yeux des hommes, elle n’est respectable que dans le silence ». Le seul crime d’Imame était d’aimer le chant. Son mari l’adore. Elle enregistre pour lui. Prend des leçons chez une ancienne chanteuse réputée. Mais son oncle la soupçonne de tromper son mari, convainc son jeune frère de l’espionner et, ensemble, ils vont la mettre à mort. « Et sur la dernière image du film », avais-je écrit, « apparaît cette inscription : « en hommage à X, assassinée en 2001 par son oncle, son frère et ses deux cousins ». L’histoire n’était pas imaginée. Elle était réelle. Et elle s’est passée en Syrie, un pays arabe développé. Et à notre époque… ». Ces crimes dits d’honneur nous les avons connus ailleurs, perpétrés par des familles turques en Alsace, en Allemagne, en Turquie. Et c’était aussi le thème de ce terrible roman du grand écrivain et intellectuel aveugle Taha Hussein qu’il avait publié en 1942, L’Appel du Karaouan « dans lequel l’oncle », avais-je écrit, « (l’oncle déjà comme dans le film syrien) ramène sa nièce qui a fauté dans la grande ville et sa sœur, mère de la nièce, vers leur village natal, et au milieu du chemin, en plein désert, s’arrête, fait descendre sa nièce de son chameau et l’égorge (et alors vient l’appel de l’oiseau Karaouan : « Ton cri parvient, ton cri se rapproche, ton cri traverse l’espace comme une lumière et nous découvre l’épouvante. Tes cris se succèdent comme des flèches lumineuses, rapides, dans la nuit ». L’écrivain en question était aveugle !) ».
Le deuxième élément qui caractérise la femme dans la culture musulmane est probablement le plus nocif, le plus vicieux : si l’homme est excité par la femme c’est la femme qui est coupable. C’est pour moi le thème principal du film égyptien, ce fameux Bus 678. « L’agression sexuelle, et encore plus le viol, apporte la honte à la femme », ai-je écrit. « Et cette honte se porte également sur ses proches, mari, fiancé, famille. Dans le film Fayza (c’est la première des trois femmes, celle qui, de conditions modestes, est obligée de prendre tous les jours des bus bondés où elle doit subir régulièrement les attouchements des mâles, jusqu’à ce que quelqu’un lui donne du courage et une aiguille pour piquer les hommes à leur endroit sensible), Fayza en a honte elle-même et n’en parlerait pour rien au monde à son mari ou à ses proches. Dans le cas de Seba c’est le mari qui en a honte (on l’a vu) (et pourtant c’est un intellectuel, un médecin). Et dans le cas de Nelly (c’est la troisiéme, la plus moderne, la plus aisée, fiancée à un banquier, qui se fait happer, en traversant la rue par un chauffeur de camion qui l’embrasse et la touche et qui veut porter plainte) là « c’est d’abord son fiancé, même s’il change d’avis à la dernière minute, puis la famille de son fiancé et finalement la famille de Nelly elle-même qui en ont honte ou plutôt – mais n’est-ce pas la même chose ? – qui ont peur pour leur réputation. Une femme violée ou simplement agressée sexuellement est une femme salie. On n’en veut plus ». Et là aussi je pourrais citer de nombreux exemples provenant de la littérature irakienne, égyptienne, tunisienne, algérienne, qui racontent tous la même histoire.
« Je crois que cette façon de voir la femme est typique pour cette culture », ai-je encore écrit. Et que cela vient de loin. Car je l’avais déjà noté en étudiant les Mille et une Nuits.  « L’homme semblait avoir deux problèmes avec la femme : il était excité sexuellement par la femme donc elle était lubrique et elle se défendait contre sa violence par la parole donc elle était rusée ! », avais-je constaté. « Les Mille et une Nuits sont loin » avais-je ajouté, « mais dans notre monde d’aujourd’hui l’obligation islamique du port du voile (et encore plus l’obligation islamiste du voile intégral) est bien une illustration actuelle de ma première assertion : il faut cacher sa vue à l’homme car cela risque de l’exciter. Et si la femme ne le fait pas ce n’est pas l’homme qui est lubrique c’est la femme. Car c’est ce qu’elle désire. L’exciter ! On comprendra bien que c’est ce même élément culturel qui provoque la honte chez la femme qui est agressée sexuellement ou violée. Elle est salie. Et elle est responsable de son agression. Puisque les hommes pensent ainsi…  Et cette conception arabo-musulmane de la femme a fini par imprégner nos propres banlieues ».
Tout ceci pour dire que nous devons combattre le foulard islamique non pas parce que c’est un signe religieux contraire à notre principe de laïcité mais parce que c’est un symbole. Le symbole de l’assujettissement de la femme à une idée que l’homme s’en fait, de sa soumission à l’homme, de son inégalité sur le plan humain, du fait que ce voile bafoue ses droits les plus élémentaires.